Aya Roxane Koffi, Côte d'Ivoire

Aya Roxane Koffi, Côte d'Ivoire

Winner - SEXUAL GENDER-BASED VIOLENCE (SGBV)

My Story

LE CYCLE DE LA VIOLENCE

L’université, est une occasion parfaite pour s’évader, n’est-ce pas ? Ce sont, paraît-il, les « meilleures années de notre vie ». Je n’ai jamais vécu autant de violences sexuelles et sexistes que là.

Dès les premiers jours, l’ordre était établi. Nos aînées s’assuraient qu’on sache la hiérarchie de ces prédateurs et on savait aux regards lubriques des profs quand on passait d’étudiante à friandise étudiée …Là encore, il fallait savoir se protéger. Malgré tout, on n’y échappe jamais vraiment.

Imaginez donc, une étudiante qui se fait peloter en classe avec l’approbation des uns et le silence des autres, par des hommes de sa classe, et qui après s’être défendue, se retrouve moquée et compromise par des enseignants?

Une succession d’évènements suffisent souvent à faire perdre le sens de ses droits.

Un jour, une main s’appuie allègrement contre mes fesses alors que j’explique un exercice à un autre camarade en classe. Une gifle éclate. Ce n’est pas normal.

Un autre jour, un responsable me fait corriger des copies en plein weekend et ne cesse de passer ses mains sur mon corps. Mes mains, mes bras, mes épaules, tout mon corps se débat appuyé d’oppositions verbales qui peinent à être considérées. Je ne suis pas seule, j’ai demandé à une amie de m’accompagner. Elle me regarde impuissante et désolée. Ses sommations ne sont pas plus considérées. Il tente de m’embrasser, je n’en peux plus, je menace de laisser les copies et rentrer. Il se marre. Nous rentrons 1h après. Ce n’est pas normal.

On s’habitue plus vite qu’on ne l’imagine à toutes ces agressions, on perd la force de réagir jusqu’à ce qu’un drame arrive…En stage, je me retrouve coincée 3 mois avec cette main qui a bouleversé mes premiers jours d’étudiante rêveuse. Je m’endors, j’ai oublié le danger. Nous nous retrouvons seuls à attendre l’ascenseur. La main restée trop tactile malgré la gifle, se dote d’une bouche : « Imagines que je te viole dans l’ascenseur, nous sommes seuls, je n’aurai qu’à soulever ta jupe, imagine, je ferai ce que j’ai à faire, ce serait facile, imagine ! J’ai vu un film comme ça [raconte le viol]. Imagine! ». Je tremble. Tout mon corps tremble, mon cœur me lâche presque et j’entend chaque battement qui me crie de fuir. Je ne sais que faire.

L’ascenseur arrive. Nous montons. Je me sens mourir de l’intérieur, la bouche figée par la peur, l’humiliation et la haine. La main, dotée d’une bouche est maintenant un corps tout entier qui m’a violée psychologiquement en rigolant plein de joie et de fierté tout en expliquant comment il me possèderait par la force.

J’occulte cette histoire.

Le temps passe, voilà cette main encore sur mes seins. JE PORTE PLAINTE. Mes camarades de classe se moquent de moi, ils trouvent que je ne sais pas m’amuser. Les responsables me font comprendre la même chose, ils me disent d’être plus souple et plaisantent sur notre « future union ». C’est ça la normalité ici.

Biography


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